• Une histoire de Sauvages

     

    Chantres du politiquement correct, avant de vous défriser le poil de jambe, sachez que le terme Sauvage sera utilisé dans cette chronique selon son sens originel qui n’a rien de négatif, c’est à dire pour désigner des  »gens vivant dans la nature ».

    Les Sauvages (ou Amérindiens, Indiens d’Amérique, autochtones, Premières nations) ont eu une importance absolument capitale dans l’histoire de notre bout de pays. Déjà au tout début, ce sont eux qui aident Jacques Cartier et ses hommes alors qu’ils se les gèlent solide durant l’hiver 1535. Sans eux, peut-être que tout le monde y serait passé ! Dès ce moment d’ailleurs on nommera des lieux avec des noms amérindiens qui survivront au passage des siècles. Ils auront une influence sur toute une panoplie de domaines variés.


    Du tabac, des scalps et des filles nues

    En Nouvelle-France, contrairement à la Nouvelle-Angleterre, on traitera d’égal à égal avec les Sauvages. Champlain (qui avant d’être un pont menaçant de s’effondrer, était un chic type), humaniste dans l’âme, se fera un point d’honneur de bien les traiter. Il est curieux de leurs coutumes et les respecte souvent mieux que certains de ses compatriotes. Un évènement le marquera d’ailleurs : la Grande tabagie de 1603. Il s’agit d’un immense party d’a peu près 1000 personnes durant lequel Champlain aura un fun noir. Ils fument tous du bon tabac en se passant une pipe (ça se fait encore de nos jours, je crois) et les hommes dansent nus en brandissant les scalps sanglants de leurs ennemis (ça ne se fait plus, je crois). Après ça, ce sont les filles qui dansent sans trop de vêtements, sous le bruit de centaines de tambours. Bref, dequoi plaire à tout bon voyageur!

     

    Ingrédients d’un bon party.

    Si les Français les traitèrent mieux que les Anglais, c’est aussi à cause qu’ils n’avaient pas trop le choix : la Nouvelle-France n’était pas très peuplée et se mettre à dos les Sauvages aurait signé l’arrêt de mort de la colonie. Aussi, la religion catholique était facile d’approche pour eux à cause de son aspect mystique et ésotérique (un grand barbu surpuissant dans le ciel, un démon cornu en enfer, des anges ailés qui combattent des dragons, bref la totale) qui s’apparentait à leurs croyances.

     

    Le bon Sauvage

    Leur mode de vie charmera bien des habitants par la suite, à commencer par les coureurs des bois. En effet, chez les Sauvages, c’est le règne de la liberté : on est pas forcé d’aller faire la guerre, les filles couchent avec qui elles veulent et il n’y a presque pas de hiérarchie… Tout va au mérite et on se fiche bien de ce que vos parents ont fait! Le fait d’amasser beaucoup de possessions matérielles n’était pas connu non plus; l’important c’était d’avoir le minimum requis pour survivre et donner le reste. Cet idéal de liberté et d’égalité donnera d’ailleurs naissance au mythe du  »bon Sauvage ». Cela ne doit pas faire oublier que la liberté a toutefois ses revers : pas vraiment de place pour le faible ou le pleurnichard dans ce monde cruel! Et gare à vous si l’ennemi vous capturait, les pires supplices vous attendaient.

    On leur doit aussi les mocassins, la raquette, une des premières versions trendy du tatouage, le sirop d’érable, le tabac, bon nombre de tactiques de guerre, la crosse (le sport, évidemment, qui était pratiqué de manière pas mal plus coriace que maintenant) et un esprit d’indépendance et de liberté. Il faut noter que, bien sûr, certains Français avaient comme idée de les assimiler… mais ils constatèrent rapidement que c’était l’inverse qui arrivait :  »il arrive plus ordinairement qu’un Français se fasse sauvage, qu’un sauvage devienne Français »(1).

    Sans tomber trop dans le commentaire politique, disons qu’il est pas mal dommage de constater le bourbier social et politique dans lequel les anciens  »Sauvages » sont empêtrés. Nous gagnerions à nous souvenirs un peu plus de l’apport majeur qu’ils eurent sur l’histoire de la Nouvelle-France!

    (1) Intendant Champigny, 1699

     »Le rêve de Champlain », par David Hackett Fischer, éditions Boréal. Entre autre cet extrait.

    Chronique d’Éric Bédard, sur le site du Québec : une histoire de famille.

     »L’aventure oubliée : les Indiens d’Amérique, Des Micmacs au Red Power », revue l’Histoire (les collections)

     »Les Coureurs des bois, la Saga des Indiens blancs », par Georges-Hébert Germain, éditions Libre Expression.

     

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  • Joseph Gagné

    Au sujet de la caricature du tatouage, (que j’adore), lire le chapitre sur les tatouages dans « L’épée et la plume » d’Arnaud Balvay.

    • Nicolas Francoeur

      Merci pour la suggestion !