Depuis quelques jours, on peut entendre un peu partout au Québec une joyeuse symphonie cacophonique. Les casseroles se font sauvagement martyriser et ont les frappe avec fougue et bonne humeur pour montrer notre opposition et notre colère.
Un tintamarre à réveiller les morts.
Bien qu’on attribue l’inspiration du mouvement des casseroles Québécoises à une pratique sud-américaine, ces orchestres de cuisine ne sont pas sans rappeler les charivaris d’autrefois ! La tradition populaire remonte à assez loin (dès le XIVe) et servait principalement à dénoncer les mariages mal foutus : un vieux libidineux avec une jeune fille, une femme trop farouche battant son mari ou un époux se remariant sur le cadavre pas encore froid de son conjoint décédé. Contrairement aux charivaris modernes qui sont plutôt courts (20 minutes en moyenne, quelques heures pour ceux devenant des processions), ceux d’antan pouvaient durer plusieurs jours ! Le premier à avoir lieu en Nouvelle-France, contre une dame trop pressée de se remarier, dure carrément une semaine. On s’y costume de manière burlesque pour se donner toute une allure et on fait un vacarme avec tout ce qu’on trouve. La duo classique cuillère-casserole étant bien sur une arme de choix, tous comme les slogans railleurs et la moquerie assassine. Si vous êtes de ceux que le bruit de la contestation emmerde, consolez-vous, c’est de la petite bière comparé au passé : les charivaris, c’était la classe nationale du casse-couilles.
Charivaris et rébellions
Lors des rébellions patriotes, le charivari se transforma pour devenir un véritable outil de contestation. On en organise des douzaines contre des Anglais ou leurs alliés qui se retrouvent carrément assiégés chez eux ! On s’en prend aux propriétés et on lance quelques roches. Le charivari passe alors de conseil matrimonial carnavalesque à une arme politique redoutable. Les charivariseurs (excusez le néologisme boiteux) ne repartent qu’un fois la mission accomplie avec succès. Des chefs de milices remettront leur brevet, pliant l’échine devant le culot des patriotes en charivari.
Jusqu’aux manifestations étudiantes de 2012, le charivari avait perdu de son sens politique et c’était réconcilié »avec son rôle de tribunal populaire visant à condamner les mœurs contraires à la morale. » (1) Avec les protestations actuelles, il récupère une fonction plus proche des rébellions patriotes. On peut donc voir dans le concerto actuel des bribes de l’histoire de nos ancêtres!
Parce qu’un charivari c’est du sérieux!
Sources et complément d’info:
(1) Gilles Laporte, dans son texte »le charivari comme arme politique »
http://voir.ca/marc-andre-cyr/2012/03/28/charivari-etudiant-bring-the-noise/
http://tolkien2008.wordpress.com/2011/02/13/le-charivari-ou-comment-deranger-les-nouveaux-maries/
http://richardjohnbr.blogspot.ca/2011/01/charivaris-against-loyalists.html